Monument controversé pour les 50 ans d'indépendance du Sénégal

Publié le par sethkokohongrie

SENEGAL-MONUMENT.JPGLe "monument de la Renaissance africaine" lors de sa construction, à Dakar, en août dernier. Le Sénégal a inauguré samedi cette statue monumentale, projet personnel du président Abdoulaye Wade qui suscite des critiques liées à son coût et à son aspect, que d'aucuns jugent non conforme au code moral de l'islam. /Photo prise le 19 août 2009

REUTERS/Finbarr O'Reilly

Le Sénégal a inauguré samedi un imposant "monument de la Renaissance africaine", projet personnel du président Abdoulaye Wade qui suscite des critiques liées à son coût et à son aspect, que d'aucuns jugent non conforme au code moral de l'islam.

Le président sénégalais est arrivé devant la statue géante au son des percussions et en présence de centaines de ses partisans, dont certains agitaient des banderoles qui l'encourageaient à briguer un nouveau mandat en 2012.

Balayant les réserves exprimées au sujet du monument, Abdoulaye Wade a déclaré qu'il avait été érigé pour l'ensemble de l'Afrique qui, en ce début de XXIe siècle, est "debout et plus que jamais décidée à prendre son destin en main".

La cérémonie illustrait le cinquantenaire de l'indépendance du Sénégal et de nombreux autres pays africains.

Légèrement plus haut que la statue de la Liberté de New York, l'ouvrage, construit par les Nord-Coréens, représente une femme et un homme regardant vers le ciel et brandissant un petit enfant qui pointe le ciel du doigt.

Un imam sénégalais a lancé vendredi une fatwa (édit) contre le monument, qui relève selon lui d'une tendance "idolâtre".

Wade rejette les critiques visant la statue de cuivre, qui s'élève au sommet d'une volée de marches sur une colline dominant la capitale. Ses partisans font valoir que l'Afrique, dont beaucoup d'Etats peinent encore à trouver leurs marques, a besoin de symboles d'espoir pour l'avenir.

Pour la cérémonie, Wade avait invité une trentaine de chefs d'Etat africains et autres, dont le président zimbabwéen Robert Mugabe. Au pied de la statue se tenaient des dizaines d'enfants au visage peint représentant un organisme caritatif auquel reviendront des recettes issues des visites au monument.

SENTIMENTS MITIGÉS

Le président sénégalais, qui a 83 ans et compte briguer un nouveau mandat en 2012, portait samedi un costume de type occidental et son épouse un boubou traditionnel coloré.

Dans une interview au Journal du dimanche, il précise que le monument "représente l'Afrique qui sort de l'obscurantisme de quatre siècles et demi d'esclavage et de deux siècles de colonisation; l'Afrique qui sort à la lumière et se présente au monde avec vigueur, avec la volonté enfin de se construire pour être à la table des nations libres et développées".

"Rien n'est assez grand pour l'Afrique!", ajoute-t-il.

Concernant les accusations de gaspillage financier, il assure que "cette statue n'a pas coûté un franc au budget du Sénégal: j'ai payé en donnant un terrain".

Dans un autre entretien, accordé à RFI, à TV5 et au Monde, il enfonce le clou:

"Je n'ai jamais dépensé un franc du budget pour la réalisation de cette statue. J'ai dit aux (constructeurs) Coréens que je n'avais pas d'argent mais que je pouvais les payer en terrains".

"Qu'on ne dise pas que j'ai dépensé 23 millions d'euros. Je sais que quand je construis un monument de ce genre, tout l'environnement prend de la valeur(...). Il n'y a pas d'argent sorti. Le coût est de 23 millions d'euros. Mais la valeur, c'est trois ou quatre fois plus!", dit-il dans le même entretien.

Le sénateur Ahmed Bachir Kounta, allié politique de Wade, rappelle à Reuters que "chaque oeuvre d'architecture suscite des controverses - regardez la Tour Eiffel à Paris".

Bon nombre de Dakarois, confrontés à de fréquentes coupures de courant, à des infrastructures routières en mauvais état et aux problèmes de chômage, nourrissent des sentiments mitigés envers le monument construit en bord de mer.

"En 2010, l'Afrique se doit de renaître", déclarait un Sénégalais de 36 ans, Thierno Dienj, partisan des socialistes (opposition), dans une petite foule rassemblée samedi pour une manifestation antigouvernementale.

"Mais ce monument ne prend pas en compte la hausse du coût de la vie ici", ajoute-t-il, en se faisant l'écho des doléances fréquentes de la population face à l'inflation.

Avec Diadié Ba et Kim Gjerstad; Eric Faye et Philippe Bas-Rabérin pour le service français

Publié dans Afrique News

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